La structure tarifaire des prochains tarifs d'utilisation des réseaux publics d'électricité "TURPE 7"

 

Les tarifs d’utilisation des réseaux publics d’électricité actuels, dits « TURPE 6 HTB » pour le réseau public de transport et « TURPE 6 HTA-BT » pour les réseaux publics de distribution, sont entrés en vigueur le 1er août 2021, pour une durée de quatre ans. Les prochains tarifs dits « TURPE 7 » devraient donc entrer en vigueur le 1er août 2025.

Leur élaboration doit prendre en compte et accompagner la transformation rapide du système énergétique afin de remplir les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment :

  • des besoins importants d’investissement dans les réseaux électriques : ces réseaux sont au cœur de la transition énergétique en cours. Ils devront se transformer pour faire face à la hausse de la consommation d’électricité et accueillir les nouvelles capacités de production en particulier renouvelables, l’électrification de l’industrie, du transport et du chauffage, ainsi que les nouvelles interconnexions avec les pays voisins qui accompagneront ces développements. Par ailleurs, le vieillissement d’une partie du réseau et les besoins croissants d’adaptation au changement climatique pourraient aussi nécessiter des investissements de mise à niveau et de sécurisation des réseaux ;
  • un développement de la production d’énergie renouvelable décentralisée : les parcs de production éoliens et solaires, en grande majorité raccordés aux réseaux de distribution, ont augmenté de près de 40% entre 2019 et 2022, pour atteindre respectivement une puissance installée de 20,3 GW et 16,5 GW. Leur rythme de développement va encore s’accélérer. Ces nouveaux raccordements ont un fort impact sur le dimensionnement des réseaux électriques, notamment en créant des configurations dans lesquelles le réseau de distribution devient également dimensionné par la production, et non plus seulement par la consommation, comme il l’était historiquement ;
  • des besoins de flexibilité en forte croissance : le développement de la production à partir d’énergies renouvelables (ENR) et la réduction du recours aux centrales thermiques à partir d’énergies fossiles renforceront les besoins de recourir aux flexibilités du système électrique que ce soit au niveau national (équilibre entre production et consommation) ou local (congestions sur les réseaux). Dans cette perspective, la CRE relève plusieurs enjeux :
    • l’optimisation du placement des heures pleines et heures creuses constitue un pilier de la flexibilité des consommations résidentielles. Le placement des plages d’heures pleines (tarif plus élevé) et d’heures creuses (tarif moins élevé) est un moyen efficace d’inciter au déplacement des consommations aux meilleurs moments de la journée du point de vue du système électrique. Ainsi, certains usages, essentiellement les ballons d’eau chaude, sont pilotés automatiquement en fonction de ces heures.

Le développement continue du photovoltaïque générera de plus en plus largement des heures particulièrement favorables au système électrique en cours de journée d’été (avril à octobre inclus). A contrario, la récente crise énergétique a mis en exergue l’importance du bon placement des heures creuses l’hiver et les contraintes additionnelles qu’un placement inadapté peut créer pour le système.

Le gain d’un placement optimal des heures pleines et heures creuses profite au fonctionnement du réseau mais également, plus largement, au système électrique. En effet, la capacité de consommer aux heures où la production est la moins contrainte, et donc a priori aux heures les moins chères de l’année, doit permettre, de faire baisser le coût global de l’électricité ;

    • le développement des stockages : de nombreux projets d’installation de stockages par batteries se sont développés sans soutien public, permettant d'atteindre une capacité raccordée au réseau de près de 786 MW à fin octobre 2023. Ces dispositifs sont compétitifs pour la fourniture de services système (équilibre offre-demande à très court terme, réglage de la tension, etc.), mais pourraient également être utiles dans de très nombreuses autres situations (offre-demande nationale, flexibilités locales, etc.). Combinant production et consommation, leur comportement est spécifique du fait de leur flexibilité intrinsèque. Ils ont ainsi la possibilité de participer activement à soulager le réseau. Les signaux tarifaires qui leur sont transmis pourraient donc être spécifiques.

Les Stations de Transfert d’Énergie par Pompage (STEP) constituent également une catégorie d’actifs de stockage flexibles qui peuvent contribuer à la résolution de contraintes système. Cependant elles connaissent un développement plus limité ;

    • le pilotage des bornes de recharge : le nombre et la puissance installée des points de recharge ont doublé en deux ans, passant de 783 000 points de charge totalisant une puissance de 4,2 GVA en octobre 2021, à 1 669 000 points de charge et 10,2 GVA en octobre 2023. Un récent sondage mené par Enedis relève que seuls 26 % des utilisateurs déclarent piloter la recharge de leur véhicule, alors que ce pilotage sera de plus en plus nécessaire au bon fonctionnement du système électrique et pourrait apporter un gisement de flexibilité important, comme le montre le récent rapport de la CRE sur le sujet ;
  • le développement de l’autoconsommation : initiative personnelle ou d’un groupe, l’autoconsommation permet de produire son électricité décarbonée localement, tout en cherchant à synchroniser la consommation et la production. Bien que le réseau soit moins sollicité, sa disponibilité reste une garantie précieuse et indispensable pour les auto-consommateurs. Le gain pour le réseau peut se matérialiser lorsque la production et la consommation sont synchrones sur les périodes les plus chargées. Cet état de fait justifie une tarification dédiée valorisant le bénéfice que peut apporter l’autoconsommation par la réduction des pointes du réseau sans occulter le rôle assurantiel du réseau.

Au regard de ces enjeux, l’achèvement du déploiement massif des compteurs évolués sur la zone de desserte d’Enedis notamment permet d’utiliser pleinement les nouvelles fonctionnalités qu’ils offrent, telles que la mise en place d’une tarification plus fine. Les compteurs évolués représentent un outil important pour la construction d’offres tarifaires incitatives permettant de renforcer les flexibilités des usages.

***

La présente consultation publique sur la structure tarifaire du TURPE ouvre une large phase de concertation tarifaire menée par la CRE qui s’étalera jusqu’à fin 2024. La CRE envisage d’organiser différents ateliers afin d’associer au mieux les parties prenantes à ces travaux.

La « structure tarifaire » correspond à la façon dont les coûts de réseaux sont affectés aux différents types d’utilisateurs, au travers de chaque composante tarifaire (comptage, gestion, soutirage notamment). Cette allocation vise à envoyer les signaux économiques pertinents aux différentes catégories d’utilisateurs afin d’optimiser les coûts des réseaux, à court, moyen et long terme. La structure tarifaire est ainsi fondée sur le principe de reflet des coûts : il s’agit de répercuter à chaque utilisateur les coûts qu’il génère en fonction de ses caractéristiques d’utilisation des réseaux. Ainsi, le consommateur qui adapterait son comportement en sollicitant moins le réseau aux heures les plus critiques constatera une économie de facture cohérente avec les baisses de coûts qu’il permet.  Dans cette perspective, le niveau de différenciation des plages temporelles doit être suffisant pour les rendre incitatives pour les utilisateurs.

La période tarifaire TURPE 6 a initié des évolutions importantes de la structure du TURPE pour prendre en compte les nouvelles données technico-économiques disponibles, mais aussi les conséquences de la transition énergétique. Une nouvelle méthodologie, fondée sur les coûts marginaux, a été mise en place afin d’envoyer le signal économique le plus efficace aux utilisateurs. Cette nouvelle méthodologie estime les coûts d’infrastructure à l’échelle locale (raisonnement à l’échelle des poches de réseaux, par niveau de tension), ce qui permet de définir un coût des consommations additionnelles à la pointe engendrant des besoins locaux de renforcement du réseau. L’utilisation de données plus fines a permis de répercuter plus précisément, dans les différentes versions tarifaires, les coûts correspondant aux différentes utilisations du réseau, et a conduit à une hausse marquée, à niveau tarifaire constant, de la part puissance des tarifs (de +20 % en moyenne et jusqu’à +97 % pour le niveau de tension HTA).

En outre, le TURPE 6 HTA-BT a mis en œuvre la généralisation de l’option à 4 plages temporelles en BT ≤ 36 kVA à l’horizon 2024.

Enfin, la CRE avait notamment appelé, pour la période du TURPE 6, les gestionnaires de réseaux à la vigilance sur les évolutions que pourraient introduire les nouveaux usages et rappelé que l’un des enjeux majeurs de cette nouvelle période sera de placer correctement les heures creuses, en fonction des spécificités locales du réseau.

La CRE envisage de conserver les principes de construction de la structure du TURPE 6, tout en prenant en compte l’intensification de la transition énergétique et ses effets de plus en plus structurants pour le réseau.

***

La CRE publie donc une première consultation publique sur la structure tarifaire du futur TURPE, qui sera suivie par des consultations publiques complémentaires au cours de l’année 2024. La présente consultation expose principalement :

  • les analyses préliminaires de la CRE sur les évolutions possibles du placement des plages temporelles type heures pleines / heures creuses pour s’adapter aux évolutions à venir et plus particulièrement pour tirer parti de l’accroissement de la production photovoltaïque, tout en répondant aux contraintes fortes du système électrique sur certaines heures. La CRE étudie en conséquence la possibilité de privilégier le placement des heures creuses lorsque la production à partir d’ENR est abondante comme c’est le cas durant les journées d’été. Cela pourrait conduire à augmenter le nombre d’heures creuses disponibles en été. De même, la CRE envisage de déplacer certaines heures creuses actuellement positionnées sur des plages horaires pendant lesquelles une forte consommation pourrait créer des tensions sur l’équilibre offre-demande. De ce fait, les heures pleines et creuses pourraient être différenciées entre l’été et l’hiver, pour s’adapter à la saisonnalité des besoins du système électrique.

Par ailleurs, la CRE a l’intention de mener une concertation au 1er semestre 2024 sur la question plus générale de la transmission des signaux horo-saisonniers du fournisseur jusqu’au client final dans les offres de fourniture ;

  • la possibilité d’introduire une nouvelle tarification soutirage/injection pour les batteries. Cette tarification, optionnelle, aurait pour objectif d’envoyer des signaux tarifaires permettant d’exploiter au mieux les capacités de stockage au bénéfice du réseau. Ainsi, les sites d’injection-soutirage pourraient recevoir une incitation à un fonctionnement contracyclique par rapport à la poche dans laquelle ils se situent (par exemple, à injecter lorsque les autres utilisateurs de la poche soutirent fortement) ;
  • la mise à jour des données et l’amélioration de la méthode utilisée par la CRE pour construire la composante de soutirage des TURPE 7. La CRE envisage de reconduire les principes de la méthode appliquée pour le tarif TURPE 6, en y apportant des précisions sur la prise en compte des pointes d’injection du réseau, afin de la rendre plus robuste aux évolutions du système. La CRE présente dans cette consultation, à titre purement illustratif, les grilles tarifaires qui en découleraient avec les données mises à jour.

Cette consultation publique sera accompagnée par un ou plusieurs ateliers dédiés courant janvier 2024, ouverts à toutes les parties intéressées.

 

Consulter la note technique

La consultation est fermée.

Besoin d'aide ?